« Quatre heures du matin » (chronique 11)

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Modérateur : Sirène

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sheumas17
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C’est le moment de l’aube. « Quatre heures du matin… ». Surtout pas une heure plus tard, pas cinq heures, quand « Paris s’éveille » ou quand « cinq heures du mat, j’ai des frissons… » On est loin de tout cela… « Quatre heures du matin, c’est l’instant le plus lourd… ». Instant indicible, précieux, « l’une de ces heures pâles de la nuit » que chantait Ferré. Instant fugitif qui jette l’enfant Rimbaud « au bas du bois », et lui ouvre les lèvres de « l’aube d’été ».
La musique que Julien Clerc a associée à ce délicat poème de Maurice Vallet a quelque chose d’épiphanique. Les premières notes de guitare, la basse en rythme binaire ternaire, puis les trompettes célèbrent un temps en suspension, « quatre heures du matin », referment le rideau de la nuit et entrouvrent la « gaze » du matin. « Les portes sont fermées, les fenêtres sont vides… il va bientôt faire jour, il fait déjà presque froid ».
Les yeux se ferment sur une nuit de tourmentes, presque baudelairienne, partagée entre des « fenêtres vides » et une « chambre double », témoin de « ma migraine, mon ennui, le début de ma haine et le fond de mon orgie ». « Les bouteilles vides » sont comme « la fiole de laudanum ». Elles sonnent le rappel sournois du « vieux malaise », et refont la place à « l’Horloge » des Fleurs du mal : « elles arrivent, les rides »… Bref, le retour au matin est d’abord lourd, cruel, cynique ! « Hue donc, bourrique, sue donc, esclave ! vis donc, damné ! »
Et cependant, au seuil de la journée, après la nuit des cauchemars et « des ombres étranges », une silhouette se lève, « les pierreries regardèrent ». De l’autre côté de la nuit, où qu’elle soit, « parmi les clochers et les dômes… Sur les quais de marbre… En haut de la route, près d’un bois de laurier », quelle qu’elle soit, femme complice, déesse chimérique et ensorceleuse, créature d’exotisme ou d’ivresse, porteuse de chevelure marine ou de « bijoux sonores », elle promet une nouvelle dose d’enchantement : « quelque part, là-bas, le soleil d’aube larmoie sur des champs inondés. Je vais bientôt courir et me jeter vers toi, je viens m’anéantir, me sourire dans tes bras »
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